Chaleur et compétence dans les comparaisons sociales interpersonnelles

Julie Terache (Université Catholique de Louvain, Psychological Sciences Research Institute)

Abstract: Les deux dimensions de chaleur et de compétence sous-tendent le jugement (Fiske et al., 2002; Yzerbyt, 2016). Des travaux révèlent que ces deux dimensions entretiennent souvent une relation négative, à savoir qu’un jugement positif sur une des dimensions entraînera un jugement négatif sur l’autre, un effet appelé ‘compensation’ (e.g., Yzerbyt, Provost & Corneille, 2005). Cet effet émerge à la fois dans les comparaisons intergroupes et dans la perception des personnes, mais n’a jamais été examiné dans le cadre de comparaison interpersonnelles impliquant le soi en tant qu’individu (et non en tant que membre d’un groupe). Dans 3 expériences, nous avons adapté le paradigme du Quiz Master (Ross, Amabile, & Steinmetz, 1977) afin de créer une situation de comparaison sociale sur le domaine de la compétence. Les participants Questionnés et Questionneurs (Expériences 1 à 3) ainsi que les Observateurs (Expériences 2 et 3) évaluaient les deux concurrents sur des traits de compétence et de chaleur. Les résultats indiquent que les Questionneurs étaient perçus comme plus compétents, et ce à la fois par les Observateurs et la Questionnés mais pas par les Questionneurs eux-mêmes, répliquant ainsi le pattern du Quiz Master. Concernant les évaluations de chaleur, une compensation émergeait dans les jugements des Observateurs qui percevaient les Questionnés comme étant plus chaleureux que les Questionneurs. Alors qu’aucune compensation ne se produisait chez les Questionnés, les Questionneurs quant à eux percevaient également les Questionnés comme plus chaleureux. Ces résultats suggèrent que la compensation émerge dans les jugements d’observateurs extérieurs, mais difficilement dans les jugements des membres de l’interaction. Au-delà de la compensation, ces résultats suggèrent également que la connaissance de l’avantage situationnel des Questionneurs (à la base de l’effet d’erreur fondamentale d’attribution et des conclusions de Ross et al., 1977) est peut-être plus limitée qu’elle n’y parait. Ces travaux seront discutés au jour de recherches indiquant que les individus éprouvent souvent des difficultés à exprimer leur supériorité sur des cibles de comparaison.