Le concept d’intersectionnalité permet de décrire l’expérience spécifique des personnes appartenant à de multiples groupes dominés. Des études ont montré que les processus de discrimination exercé à l’encontre des membres de ces groupes est qualitativement différent de celui des membres d’un seul groupe minoritaire, ce qui demande des outils théoriques différents pour les comprendre. En outre, la discrimination est souvent étudiée comme un comportement actif, mais une forme plus subtile consiste à ignorer les individus par un mécanisme d’invisibilité (ignorer ou négliger le stimulus). Un premier modèle d’ invisibilité intersectionnelle décrit comment les personnes ayant des identités de groupes subordonnés multiples sont invisibles dans divers contextes. Certain·es auteur·es affirment que, par exemple, les femmes noires sont invisibles parce qu’elles ne sont pas des prototypes des catégories “Noirs” ou “femmes”. Pourtant, une grande partie de ces processus reste inconnue. Nos études tentent de répondre à trois importantes hypothèses. D’abord, une série d’études confirmera la présence de l’effet d’invisibilité interpersonnelle dans de tels contextes, et adressera la distinction entre l’invisibilité, liée à la cécité attentionnelle, et la fongibilité/interchangeabilité. Nous mettrons en évidence la médiation de ce processus via des stéréotypes, liés à des objectifs interpersonnels. Ensuite, nous chercherons à savoir si l’invisibilité est un processus basé sur une perception de la (non)prototypicalité des individus ou sur les objectifs des percevant·es. Pour distinguer entre ces deux hypothèses nous manipulons à la fois le point de vue des percevant·es, leurs buts, et la catégorisation de la cible, ce qui manque encore à la littérature actuelle.
[The term intersectionality describes the specific experience of people who belong to multiple dominated groups. The process of discrimination towards members of these groups has a different quality than towards those that belong to one single minority group. To understand the particular experience of these groups, we need a different theoretical approach. In addition, studies often investigate the active process of discrimination. However, a more subtle form of discrimination is a mechanism of invisibility, namely to ignore or neglect the individuals. A first model of intersectional invisibility describes how people with multiple dominated group identities are invisible in different contexts. Some authors state, for example, that black women are invisible in some spaces because they do not correspond to the prototype of the categories “Black” or “women”. A large part of these processes are still not understood. In our studies, we attempt to answer three important hypotheses: First, in a series of studies, we want to confirm the presence of the effect of interpersonal invisibility in an intersectional context. Second, we want to address the difference between invisibility as related to inattentional blindness, and fungibility, or interchangeability. We hypothesize that this process is mediated by stereotypes related to interpersonal goals. Third, we investigate whether the invisibility is based on the perception of (non-)prototypicality of individuals or the goals of the observers. To distinguish between the two hypotheses, we will manipulate the point of view of the observer, their goals and the category of the “target”, a new approach not yet present in the current literature.]